Houcine MAIMOUNI
Alors que la troisième vague du coronavirus balaie de larges pans de l’espace européen avec son lot quotidien de contaminations et de décès, le Danemark semble s’acheminer vers une réouverture prudemment calculée pour renouer avec un « été normal », ou presque.
C’est du moins ce qui ressort d’une rencontre que la Première ministre, Mette Frederiksen, a tenu la semaine dernière avec les chefs des partis politiques pour marquer le premier anniversaire du verrouillage du pays, le 11 mars 2020, afin de contenir la propagation galopante de l’épidémie.
Alors que les débats au début de la pandémie ont été marqués par des mines sombres, celui de jeudi dernier était plutôt gai et optimiste, à l’image de l’humeur d’une population qui sort des longues journées hivernales pour embrasser les premiers signes du printemps.
Ce changement d’humeur se ressent dans les différentes déclarations de Mme Frederiksen, évoquant tantôt « une scolarité assez normale en avril », tantôt un retour à « un Danemark normalisé dans quelques mois ».
« Je suis tout à fait heureuse lorsque j’écoute le débat, car il indique que nous pouvons établir un plan de réouverture durable », a-t-elle souligné.
A l’issue d’une visite à l’hôpital Herlev de Copenhague, elle a assuré qu’avec « les expériences que nous avons maintenant, je suis plus optimiste que je ne l’ai été ces derniers mois, et je crois en un été avec un Danemark presque normalisé ».
Et il y a de quoi. Jusqu’à lundi, le Danemark a enregistré depuis le début de la pandémie 221 071 cas positifs et 2393 décès liés au coronavirus; des chiffres qui en font un des bons élèves en matière de gestion de la pandémie.
Mieux, le pays nordique de 5,8 millions d’habitants figure parmi les premiers de l’UE en matière de vaccination, avec 586 153 personnes (10% de la population) ayant reçu une première dose et 258 786 ayant reçu la seconde injection (4,4%).
Petit bémol pourtant. Premier pays à avoir suspendu « par précaution » le vaccin d’AstraZeneca pour une période de deux semaines au moins, le Danemark risque de voir son plan vaccinal reporté.
Le plan ajusté stipule que tous les résidents de plus de 16 ans qui souhaitent se faire vacciner devraient désormais attendre le 15 août, au lieu du 18 juillet comme initialement prévu, quoique le plan puisse être raccourci si les autorités décident de reprendre le vaccin anglo-suédois.
Loin d’entamer l’optimisme ambiant, ce contretemps semble confirmer la détermination de Mme Frederiksen, qui non seulement croit en un été normalisé, mais évoque déjà des festivals et des concerts désormais « à portée de main ».
Dans la foulée, les organisateurs de festivals ont été rassurés de planifier « soigneusement » des événements pour cet été et de poursuivre leurs préparatifs malgré les aléas des incertitudes.
Le gouvernement et un large éventail de partis parlementaires ont convenu, la veille, d’un paquet de soutien économique pour les grands événements estivaux si la situation du coronavirus entraînerait leur annulation éventuelle.
En vertu de cet accord, les petites entreprises pourront demander jusqu’à 90% de compensation tandis que le plus grand organisateur pourra récupérer 50% en cas d’annulation. De plus, un fonds d’urgence de 30 millions de couronnes sera créé pour les festivals caritatifs.
Pour accompagner cet élan, l’Agence danoise pour la numérisation vient de lancer un appel d’offres pour la conception d’une nouvelle application de passeport corona devant comporter le statut de vaccination et d’anticorps des détenteurs, ainsi que les résultats PCR et des tests rapides.
« Les applications spécifiques dépendront, entre autres, de l’évaluation des professionnels de la santé. La solution sera développée en partenariat avec des entreprises et des organisations culturelles pour garantir qu’elle répond à leurs demandes individuelles », a expliqué l’Agence.
Un des premiers pays à annoncer des plans pour un passeport vaccinal numérique devant être affiché aux frontières, le Danemark semble se projeter déjà dans l’après-pandémie, avec ou sans les récalcitrants d’entre ses partenaires européens.
C’est dans cette perspective que s’inscrit la visite controversée de la PM danoise, début mars en Israël, pour s’entretenir avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu, et le chancelier autrichien Sebastian Kurz, au sujet d’éventuelles installations de production conjointe de vaccins Covid-19.
La veille, la fondation qui contrôle le géant pharmaceutique danois Novo Nordisk a déclaré qu’elle était en pourparlers préliminaires avec le gouvernement pour établir une production locale de vaccins.
Difficile de ne pas établir de rapport entre cette annonce et les préoccupations ouvertement formulées par Mme Frederiksen à l’égard des retards accusés par l’UE, en termes de commandes, d’approbation et de distribution des vaccins anti-Covid-19 !
(MAP)