Sous le Haut Patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, la 11ᵉ édition du Rendez-vous de Casablanca de l’Assurance s’est imposée, une fois encore, comme le théâtre d’une réflexion de haut vol sur l’avenir d’un secteur en pleine mue. Organisé par la Fédération Marocaine de l’Assurance (FMA), ce grand-messe annuel a réuni plus d’un millier d’acteurs venus scruter les horizons que dessinent les nouvelles technologies et l’intelligence artificielle pour le monde de l’assurance.
Dès les premiers mots, la solennité des interventions a donné le ton d’un débat ancré dans son temps. Mohamed Hassan Bensalah, président de la FMA, a rappelé que l’irruption de l’intelligence artificielle ne constitue pas une simple évolution, mais bien une révolution des métiers, des chaînes de valeur et de la relation à l’assuré. Il a plaidé pour un écosystème réglementaire propice à l’audace technologique, à la floraison des Insurtechs et à l’élargissement du filet assurantiel à des franges encore exclues de la couverture.
La ministre de l’Économie et des Finances, Nadia Fettah, a, quant à elle, souligné l’impératif d’un encadrement rigoureux face aux défis immenses que pose la digitalisation accélérée : cybersécurité, souveraineté des données, mais aussi ciblage stratégique des investissements publics et privés. Othmane Alami, Secrétaire général de l’ACAPS, représentant M. Abderrahim Chaffai, a pour sa part dressé un constat lucide : l’IA, la blockchain ou encore le cloud pourraient redessiner jusqu’à 40 % du paysage mondial de l’emploi, une mutation aux effets systémiques.
Au-delà des mots, deux actes forts ont scellé cette édition : un accord de coopération avec l’Association des Assureurs du Ghana, pays à l’honneur, pour favoriser les convergences technologiques Sud-Sud, et une charte conjointe FMA-ACAPS inscrivant l’égalité de genre dans les priorités d’innovation assurantielle, en phase avec les ambitions nationales d’inclusion financière.
Conférences, panels, keynotes : le contenu intellectuel de ces deux journées a été à la hauteur des enjeux. Des figures de proue du secteur international, telles que Florence Lustman (France Assureurs), Byung-Rhae Lee (Corée), Petra Hielkema (EIOPA) ou encore Andrew N. Mais (NAIC), ont croisé leurs regards sur les dilemmes contemporains : comment concilier hyperpersonnalisation et mutualisation ? Comment ajuster les cadres de régulation à un monde en perpétuelle accélération technologique ? Comment faire de l’intelligence artificielle un levier d’humanisation de la relation client, et non son contraire ?
La deuxième journée a creusé plus loin encore. Bozenna Hinton (Association Actuarielle Internationale) a livré une réflexion aiguë sur la tension éthique entre équité tarifaire et précision algorithmique, tandis que Thorsten Steinmann (E+S Rück) a offert une lecture stratégique des apports des technologies émergentes à la gestion des risques climatiques — ceux-là mêmes qui redessinent la carte des vulnérabilités.
Enfin, la présentation de cas d’usage concrets — de start-ups telles qu’Acheel, Klaimy, Korint ou Synapse Medicine — a démontré que l’innovation ne se limite plus aux incantations : elle est déjà à l’œuvre, en santé, en automobile, en prévention. Le message, limpide, a traversé tous les échanges : une IA bien encadrée, bien pensée, est une promesse de résilience, d’agilité, et de justice assurantielle accrue.
Dans une atmosphère empreinte de gravité et d’enthousiasme, cette 11ᵉ édition s’est affirmée comme une agora stratégique où s’élabore, en conscience et en coopération, l’assurance de demain. Une assurance qui, tout en embrassant la puissance des algorithmes, demeure fidèle à sa vocation première : protéger, comprendre, et bâtir la confiance dans un monde incertain.