Lorsque la religion et la politique se sont étouffées ensemble dans un marécage de populisme.

Lorsque la religion et la politique se sont étouffées ensemble dans un marécage de populisme.

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Lorsque la religion et la politique s’étouffent au sein d’une marée de populisme

Ce n’est pas par hasard que les mouvements islamistes ont accédé à la scène politique marocaine à un moment de turbulence historique. Ils se sont infiltrés dans le cœur de millions de Marocains par les portes de l’« identité », de « la justice » et de « la lutte contre la corruption », se présentant comme des sauveurs moraux en temps de trahison politique. Mais comme l’histoire le rappelle sans cesse : ce ne sont pas les intentions qui façonnent les transformations, mais la compétence, la vision et la capacité à changer. Malheureusement, toutes ces qualités ont été totalement absentes de l’expérience des islamistes au Maroc.

Dès leur arrivée au parlement et dans les institutions de l’État, la faiblesse structurelle de l’idéologie islamique s’est révélée. Leur discours était clairement conçu pour émouvoir, plutôt que pour construire. Ils excellaient dans l’art oratoire plus que dans la législation, jouaient sur les émotions des gens plus qu’ils ne géraient des dossiers. Lorsqu’ils ont été confrontés au test du pouvoir, ils ont chuté de façon morale et politique retentissante, trahissant leurs promesses, s’alliant avec ceux qu’ils avaient auparavant dénoncés, et se sont tus face à la corruption qu’ils avaient juré de combattre.

L’idéologie islamique dans la politique marocaine est devenue une version révisée du populisme masqué par la religion. Au lieu de présenter un projet équilibrant la référence religieuse et les exigences de l’État moderne, ils se sont laissés entraîner par des calculs électoraux étroits, se livrant à la justification au nom de la « réalité politique ». Nous avons vu comment des concepts comme la « bonne gouvernance », la « lutte contre le privilège » et l’« austérité » sont devenus des armes politiques utilisées contre la classe moyenne, tandis que les cercles de privilège restaient intacts.

Le peuple marocain s’attendait-il à ce qu’un parti arborant le slogan « l’islam est la solution » fasse passer des lois d’austérité qui accablent le citoyen ordinaire ? S’attendait-il à ce qu’il défende la normalisation sans honte, tout en préservant les privilèges des élites, tout en exigeant des pauvres qu’ils resserrent leur ceinture ?

Les gens ont rapidement réalisé que le « projet islamique » était, dans son essence, un projet autoritaire sous couvert d’appel à la foi, ne différait guère des autres projets qui l’avaient précédé, si ce n’est par sa capacité à commercialiser le sacré.

Et parce qu’ils n’étaient pas issus d’un bagage politique approfondi, mais d’écoles pédagogiques fermées, les islamistes n’avaient rien d’autre à offrir que des slogans. Pas de visions économiques claires, pas de réformes réelles, pas de projet sociétal complet. Au lieu de mettre à jour leur idéologie pour l’adapter aux grandes transformations, ils ont préféré vivre dans l’illusion du « renforcement » et de la « califat », comme si le Maroc était un pays en dehors de l’histoire.

Avec le temps, le profil politique islamique n’évoque plus que le mépris. Il est passé de l’image de l’« homme d’engagement pieux » à celle de l’« opportuniste barbu », lisant des versets au parlement, tout en défendant en coulisse des politiques néolibérales voraces, et donnant des leçons de morale tout en vivant sur la table du pouvoir. Cette duplicité mortelle a ôté au projet islamique sa légitimité morale avant même qu’elle ne devienne politique, contribuant à creuser le fossé entre la politique et la société.

Aujourd’hui, l’islam politique au Maroc n’a plus aucun éclat, non pas parce que les gens, après la chute retentissante du Parti de la justice et du développement, ont renié la religion, mais parce qu’ils ont renié la politisation de la religion et son rétrécissement à un tacticien électoral. Il est devenu évident que la sainteté ne produit pas d’hommes d’État, que la barbe ne génère pas des institutions, et que des discours éloquents ne résolvent pas les crises économiques, éducatives et sanitaires.

Le plus grave héritage de cette idéologie est la destruction de l’espoir en la politique elle-même, ayant contribué à la propagation d’une culture d’indifférence et de nihilisme, après avoir déçu de larges pans de la population qui y voyaient une alternative.

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