Partis politiques où la diversité dans la médiocrité

Partis politiques où la diversité dans la médiocrité

- in accueil, Saïd Bou-Ayach
partis politiques

Saïd Bou-Ayach

1-Depuis la nomination d’Aziz Akhannouch à la tête du gouvernement, le 10 septembre 2021, la vie politique marocaine semble s’être enlisée dans une forme d’engourdissement, où l’action n’est pas spécialement au rendez-vous. La majorité gouvernementale, au lieu d’incarner l’élan collectif tendant vers un développement palpable au vu des grands projets dignes des plus grandes puissances économiques de ce globe qu’entreprend notre pays, elle se limite à un alignement presque cérémoniel… Bref, la majorité est là pour faire joli, se réfugiant derrière les Projets Royaux. Il serait trop facile, pourtant, de réduire cet état de fait à la seule personne du chef du gouvernement. La vérité est ailleurs : c’est l’ensemble du paysage partisan qui a failli à sa mission. Si chaque formation politique avait assumé pleinement son rôle, à savoir, celui de force de proposition, de contrepoids ou de relais des aspirations citoyennes, le pays aurait sans doute connu une dynamique politique plus saine, plus équilibrée et plus féconde. Et pendant que certains s’amusent à faire d’Akhannouch le bouc émissaire national, ils oublient un détail : en politique, les silences d’hier nourrissent toujours les soupirs d’aujourd’hui. Résultat ? Majorité et opposition, c’est du pareil au même : deux dinosaures empaillés qui rejouent la même chorégraphie poussiéreuse, coincés dans une roue de hamster, avec la grâce d’un diplodocus sur un trampoline.

2-Les récents événements ont cependant réveillé quelques cadavres politiques. Quelques manifs, quelques pancartes, et soudain, miracle ! Les partis politiques sortent de leur coma profond, tels des vautours flairant une carcasse fraîche. Les Ayacha-lovers se demandent : pourquoi tant de bavardages soudains ? Simple : ils ont senti l’odeur du buzz électoral. Les voilà qui rampent hors de leurs terriers, croyant que crier « jeunesse ! éducation ! réforme ! santé ! » suffit à effacer quatre ans de mutisme complice. Normalement, on attend les six derniers mois avant de sortir le kit de maquillage électoral et les discours recyclés. Là, un an avant les législatives, ils sont déjà en train de distribuer des sourires et des discours creux.

3-Pourquoi cette précipitation ? Parce que cette fois, ce sont des jeunes qui descendent dans la rue, et pas pour demander des likes sur TikTok. Ils réclament une réforme de la santé et de l’éducation. Rien de bien nouveau, mais venant d’une jeunesse désabusée, ça fait tache dans le décor. Alors les clowns de la scène politique paniquent, se précipitent, prennent la pose. La rue devient le nouveau plateau de télé, et chacun veut y faire son petit numéro. Résultat des courses : on assiste à du surjeu politique digne d’une mauvaise série égyptienne. Pour résumer l’état des lieux : nos dirigeants politiques ont tous largement dépassé l’âge de la retraite, certains semblent même avoir connu l’indépendance… en direct. Et pourtant, ils s’accrochent à leurs postes comme à un fauteuil chauffant en plein hiver. L’équation est pourtant digne d’un manuel de CP : il est temps de céder la place à la jeunesse, histoire de dépoussiérer un peu le paysage politique national. Cerise sur le gâteau : en finir une bonne fois pour toutes avec la grande braderie électorale, où l’on distribue des billets comme des bonbons. Mais évidemment, tout cela supposerait un minimum de dignité… une denrée manifestement épuisée chez ces vieux briscards accrochés à leurs privilèges comme des moules à leur rocher.

4-Nabila Mounib, par exemple, a cru bon venir faire un shooting contestataire en pleine manif. Eh bah, c’était une mauvaise idée, puisqu’elle s’est fait gentiment (ou pas) dégager par la foule, qui n’avait visiblement pas besoin d’une guest star. Le militantisme, ce n’est pas Instagram, et le surf sur les vagues populaires n’est pas un sport pour tout le monde. Quant à Nabil Benabdallah, éternel candidat au poste de vieux sage incompris, il continue de brasser de l’air entouré de larbins qui applaudissent ses sauts d’humeur. Son ego occupe plus d’espace que tout le siège de son parti. Entouré de valets, il continue de croire qu’il est encore pertinent, alors qu’il ne passerait même pas une élection de délégué de classe. Cependant, son échec chronique aux suffrages universels ne l’empêche pas de monter sur les plateaux télé pour régler ses comptes avec une majorité qui n’a pas voulu de lui. Finalement, son venin est moins toxique que pathétique. En bon habitué des couloirs du pouvoir, il ronge son frein en attendant qu’on lui tende une autre gamelle.

5-Et que dire de Mohamed Ouzzine, alias ministre de la Raclette ou monsieur 22 milliards, qui, par l’entremise de sa jeunesse de parti (un fan club sous hypnose à ses ordres), a réussi à faire l’impensable : inviter un condamné pour viol, Taoufik Bouachrine, à parler de… jeunesse et engagement politique. Mais quelle surenchère ! Une conférence sur le thème « De la contestation au changement » ? On aurait préféré « De l’indécence à l’abîme ». Mais non, Ouzzine persiste, flanqué de ses lunettes arc-en-ciel, à croire qu’il incarne la relève. Il incarne surtout l’abandon de toute décence, en somme une lampe grillée aux antipodes de son prédécesseur.

6-Pendant ce temps, l’USFP, le désormais fantôme rose pâle, continue sa lente agonie. Autrefois grand parti de gauche, Lachgar l’a réduit à un satellite pathétique du RNI. Un parti historique transformé en machine à ronronner. Quant au PJD, il fait ce qu’il sait faire de mieux : surfer sur la contestation en espérant un miracle électoral. Benkirane rêve d’un nouveau 20 février, persuadé qu’un coup de vent populaire peut le ramener au sommet. Il oublie juste qu’il est devenu un boomer politique, plus proche du forum des retraités que d’un retour aux affaires.

7-Le vrai bijou de cette pièce de théâtre, c’est la prestation du duo d’illusionnistes : Nizar Baraka (ex-économiste, aujourd’hui mime politique) et Najwa Koukouss (version low-cost du tribun), sur 2M, qui ont « brillé » par leur capacité à nier leur propre présence au gouvernement… En les écoutant, on aurait dit que ni le Parti de l’Istiqlal ni le PAM n’étaient au gouvernement. Magie de la politique marocaine : être au pouvoir tout en se comportant comme si l’on était dans l’opposition. Quand Akhannouch était populaire, ils le portaient en triomphe ; maintenant qu’il est radioactif, ils l’évitent comme la peste. Mais on les voit, les anciens fans du capitaine milliardaire qui, aujourd’hui, jouent les vierges effarouchées. Et pourtant, ils restent là, accrochés au même navire, en espérant que personne ne remarque qu’ils tiennent le gouvernail avec lui. Hypocrisie, quand tu nous tiens.

8-Les syndicats ? Parlons-en… S’ils étaient censés rugir, ils miaulent à peine. L’UMT, par exemple, a pour chef un Miloudi Moukharik qui semble avoir troqué les intérêts des travailleurs contre un siège confortable dans les salons du patronat. Résultat : pas un mot, pas un geste, sauf quand il s’agit de défendre… ses propres privilèges. Et pendant ce temps, les ouvriers bossent, triment, râlent, mais seuls. Mahjoub Ben Seddik, s’il observe ça de là-haut, doit en perdre le sommeil éternel.

9-Le véritable fléau ? Ce ne sont pas les crises, ni même les réformes manquées. C’est cette classe politique à l’inaction érigée en dogme. Des ministres sans légitimité populaire, des opposants de pacotille, des chefs de partis qui préfèrent rester entourés d’incompétents pour ne jamais être éclipsés. Le gouvernement actuel ? Une galerie de mannequins d’affaires déguisés en responsables. L’opposition ? Des clowns intermittents. Le peuple ? Il regarde. Désabusé. Dégoûté. Mais en vendant leurs voix aux plus offrants plutôt qu’à un programme, ils sont tout aussi responsables de cette débandade.

10-Pourtant, en 2016 déjà, le Roi Mohammed VI avait mis les mots justes. Dans son discours du Trône, il rappelait que le citoyen est la seule source de légitimité, que seuls les électeurs délèguent le pouvoir et peuvent le reprendre. Mais rien n’a changé. Quand les élections approchent, c’est le carnaval. Tout le monde oublie la décence, les alliances se font et se défont à coups de sourires artificiels et de poignées de main hypocrites. Durant la période électorale, d’après le discours du Souverain, « On assiste à une frénésie quasi-résurrectionnelle où règne le chacun pour soi, et où personne ne connaît plus personne. Tous, gouvernement et partis, électeurs et candidats, perdent la tête et sombrent dans un chaos et dans des luttes qui n’ont rien à voir avec la liberté de choix incarnée par le vote ». À bon entendeur, salut…

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