Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a présenté, mercredi lors d’une rencontre virtuelle, les conclusions et recommandations objet de son auto-saisine intitulée “pour une véritable politique publique de sécurité sanitaire des aliments (SSA) axée sur la protection des consommateurs et favorisant une compétitivité durable de l’entreprise au niveau national et international”.
Élaborée sur la base d’une approche participative, cette auto-saisine est le résultat d’un large débat entre les différentes catégories qui composent le CESE ainsi que des auditions organisées avec les principaux acteurs concernés. Elle a pour objectif d’identifier les voies possibles d’amélioration globale de la SSA au Maroc et de proposer des solutions réalistes et viables, adaptées aux contraintes auxquelles font face les professionnels et les autorités compétentes chargées de la gouvernance en la matière.
S’exprimant à cette occasion, le président du CESE, Ahmed Reda Chami, a souligné que les problématiques évoquées sur la sécurité sanitaire des produits alimentaires ne sont pas une exclusivité marocaine, mais un défis universel auquel tous les pays font face. Il a rappelé à cet égard le constat “inquiétant et assez troublant” de l’Organisation des Nations unis (ONU) qui révèle que près d’une personne sur dix dans le monde tombe malade chaque année à cause d’aliments avariés et 420.000 d’entre elles décèdent, dont un tiers d’enfants.
Au niveau national, a-t-il soutenu, les données issues du système national de la surveillance épidémiologique fait ressortir que 1.000 à 1.600 cas de toxi-infections surviennent en moyenne chaque année avec un taux d’hospitalisation de 30% à 45%.
Par ailleurs, le président du CESE a mis en avant les progrès importants réalisés en la matière au Maroc et ce, depuis 2009, notamment avec l’adoption de la loi n°25-08 portant création de l’Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA), la loi 28-07 relative à la sécurité sanitaire des produits alimentaires et la loi n° 31-08 édictant des mesures de protection du consommateur.
Et de relever que le système de sécurité sanitaire des aliments permet, aujourd’hui, aux produits marocains de pénétrer des marchés internationaux exigeants.
Toutefois, “nous constatons qu’une multitude d’établissements ne disposent ni d’agréments, ni d’autorisations sanitaires et mettent, sur le marché, des produits qui exposent la santé du consommateur à des dangers avérés mais non maitrisés”, a déploré M. Chami. Il est aussi question d’une utilisation des intrants et pesticides qui n’est pas suffisamment maitrisée au regard des normes en vigueur.
Le président du CESE a évoqué également l’absence d’une politique publique intégrée de sécurité sanitaire des aliments induisant plusieurs défaillances qui ont trait à la multiplicité des intervenants, au chevauchement des compétences, à la prédominance de l’informel et au rôle limité des associations de défense.
Sur la base de ces différents constats, M. Chami a fait savoir que le Conseil préconise trois recommandations stratégiques à même d’améliorer significativement la sécurité sanitaire des produits alimentaires.
Il s’agit ainsi de “doter le pays d’une politique publique dédiée de sécurité sanitaire des aliments”, de “passer de manière progressive du système actuel à organismes multiples, vers un système intégré, en créant une Agence Nationale de Sécurité Sanitaire des Aliments, placée auprès du Chef de gouvernement et qui devra être investie de larges pouvoirs de contrôle, de surveillance et de correction” et de “séparer l’évaluation des risques de la gestion des risques en instituant un comité scientifique indépendant d’évaluation des risques, dont la principale mission serait de fournir un avis scientifique afin d’assurer l’indépendance, l’impartialité et l’intégrité de l’information relative à la SSA”.
De son côté, Abderrahim Ksiri, président de la Commission chargée de l’environnement et du développement durable, a indiqué que cette auto-saisine propose un diagnostic global sur l’ensemble des chaines de l’approvisionnement, de production, de transformation et de distribution, mais aussi sur le système institutionnel et réglementaire.
Il a, dans ce sens, mis en lumière la coexistence au niveau de la production de deux systèmes. Le premier est un moderne capitalistique, très technique visant une production de qualité destinée en premier lieu pour le marché extérieur, tandis que le second système est plus modeste au niveau des moyens mis en oeuvre pour produire des aliments destinés principalement aux consommateurs locaux.