L’industrie événementielle agonise !

L’industrie événementielle agonise !

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Les PME de la filière de l’industrie de l’événementiel embarquent avec elles plus de 190 000 emplois directs et indirects – dans la restauration, l’hôtellerie, la logistique ou les transports. Elles ont été les premières à être touchées dès le mois de mars par l’impact naissant de la crise sanitaire. Et risquent d’attendre longtemps avant un retour à la normale de leurs activités. Le secteur est à l’arrêt depuis 8 mois, le GPPEM ( Groupement Professionnel des Prestataires de l’Evénementiel au Maroc), tire la sonnette d’alarme, car il n’y a pas que le COVID, le secteur est des plus impactés en raison de sa vulnérabilité structurelle, qui date, elle de bien avant cette pandémie.

 

« Le GPPEM est une association qui regroupe les sociétés et les auto-entrepreneurs qui composent l’écosystème de l’événementiel. Elle représente aujourd’hui le porte-parole majeur du secteur. »

 

L’industrie événementielle est au bout du gouffre !

Impossible d’anticiper, impossible de prédire l’avenir, nous avons décidé de mener cette enquête afin de comprendre et éclairer sur l’avenir pour le moins inquiétant de ce secteur.

Nous avons demandé à des professionnels de l’industrie événementielle comment ils ont vécu la crise et comment comptent-ils aborder l’avenir de leurs activités. Nous avons surtout essayé de comprendre dans quelle mesure l’Etat a pris en charge la situation alarmante de ce secteur.

Un calendrier serré qui ne laisse pas de doute sur l’avenir du secteur

Le calendrier de l’évènementiel au Maroc se déroule sur une durée de 9 mois par an ; répartis entre la fin d’année, le mois de Ramadan et l’Aïd el Kebir. « Comme la préparation d’un évènement dure plusieurs mois, professionnels du secteur et l’ensemble de l’écosystème peuvent avoir une visibilité d’au moins 6 mois sur les retombées économiques » ce qui peint un tableau plutôt sombre pour les professionnels.

Le GPPEM, qui regroupe aujourd’hui quelques 400 adhérents, présidé par Aziz Bouslamti, un professionnel du secteur, nous précise qu’il s’agit d’un volume d’activité de 90 événements par jour soit 25.000 par an et d’un chiffre d’affaires généré de 38 M DHS représentant pas moins de 5% du PIB national.

Les 5000 agences qui travaillent dans ce secteur représentent un CA variable entre 500 KDHS et 300 MDHS, toutes sous-branches de l’activité confondues.

 D’autres secteurs sont gravement touchés par la paralysie de l’ISE

L’ISE étant un catalyseur important des autres secteurs de son écosystème en raison de sa forte capacité à intégrer d’autres métiers (au moins une trentaine) dans la réalisation d’un événement, d’autres secteurs sont touchés et les pertes ne sont pas minimes.

Le premier secteur est le tourisme à travers toutes ses composantes : l’hébergement, le transport, la restauration, l’animation qui bénéficie à lui seul de 30% du CA généré par l’ISE.
Le deuxième secteur est celui de la construction éphémère et l’on parle de 13% du CA généré par l’ISE.

Le secteur de la communication également, qui bénéficie de 12% du CA généré. D’autres secteurs sont également impactés tels que la logistique, l’accueil-hygiène-sécurité, l’artisanat, l’animation, les arts vivants pour 4% sur le CA global.

« Ce qu’il faut retenir, c’est que, pour chaque 100 DHS investis directement dans l’ISE, 65 DHS de CA sont générés de manière induite » nous dit-on.

Nous avons posé la question sur le nombre de faillites dans le secteur, la réponse est furtive et peu convaincante, pas de faillites officielles, mais beaucoup de faillites officieuses. Bien que « certains opérateurs ont procédé à un licenciement de 100% de leurs personnels et d’autres en ont gardé 50% mais sans solde », nous souffle presque un professionnel qui souhaite ne pas être cité.

Des groupes sur WhatsApp essaient de s’organiser pour se faire entendre

L’état des « laissés pour compte », les techniciens du secteur est à plaindre, non à pleurer. « Les gens vendent leurs meubles aujourd’hui pour manger ». Ils s’organisent en groupe WhatsApp dans plusieurs villes du Royaumes : Casablanca, Rabat, Marrakech, Tanger et Fès. Cela parle de « sit-in », mais les professionnels leur expliquent que la « RELANCE » est en négociation.

 Le GPPEM « orchestre» des négociations avec les autorités est le seul espoir du secteur

Mekki Lahlou, professionnel de l’industrie de l’événementiel et porte-parole du Groupement nous explique que la pandémie n’a fait que mettre à nu les problèmes structurels du secteur. Et qu’au sein du Groupement, les professionnels se sont accordés à prendre le taureau par les cornes et mettre tout à plat. L’objectif étant de dépasser la pandémie et structurer définitivement le secteur.

« Le premier handicap de notre secteur, aussi important soit-il, est que nous ne sommes pas identifiés ni juridiquement ni fiscalement, ce qui rend tout appui officiel difficile à obtenir »

« Le premier handicap de notre secteur, aussi important soit-il, est que nous ne sommes pas identifiés ni juridiquement ni fiscalement, ce qui rend tout appui officiel difficile à obtenir », nous déclare Mekki Lahlou. Qui a d’ailleurs précisé que toutes les démarches auprès des ministères ont été effectuées.

Les revendications ont bien été déposées et discutées. Bien plus, notre contact nous explique que le GPPEM remercie officiellement le Ministre de l’Industrie Moulay Hafid Elalamy, dont la réactivité et la prise en charge des demandes a été exemplaire, bien qu’il n’y ait pas de solution au jour d’aujourd’hui.

Un guide de protocole sanitaire, mais pas de reprise

Dès début mars, le GPPEM avait mis en place un ensemble de mesures pour soutenir les prestataires. Mais si le protocole sanitaire, réalisé en collaboration avec le cabinet Veritas et Imanor, a été annoncé, dans un communiqué et déposé depuis début juillet chez le Ministre de l’Industrie, du Commerce et de l’Économie Verte et Numérique, il n’y pas eu de réaction des grands donneurs d’ordre publics et privés pour maintenir une partie de leurs événements.

Sachant que 80% du budget du secteur émane de l’Etat, l’on se pose la question si ce n’est pas une volonté de garder le budget pour autre chose.

Des revendications en cours d’examen

Le GPPEM a formulé plusieurs revendications, jusqu’ici en traitement. En premier lieu, le secteur demande la tutelle du Ministère de l’Industrie, du Commerce et de l’Économie Verte et Numérique.

En posant la question autour de nous sur le choix du ministère, la réponse est unanime, un simple benchmark des pays voisins, comme la France, l’Allemagne et le Canada confirme que la tutelle revient d’office à ce département.

Notre source anonyme nous explique que certains opérateurs du secteur souhaitent plutôt s’affilier au Ministère de la Culture.

Pour cela, le GPPEM appelle à une structuration de fond et a également émis sa deuxième revendication qui est de créer une nomenclature fiscale et juridique qui permettra d’identifier les opérateurs et unifier les efforts de structuration.

Une troisième revendication porte sur la validation du guide de relance économique du secteur, par Ministère de l’Industrie, du Commerce et de l’Économie Verte et Numérique afin de permettre aux professionnels de reprendre leurs activités et éviter à toutes ces entreprises de mettre la clef sous la porte.

Le GPPEM a élaboré un plan de relance qu’il a partagé avec les autorités et les donneurs d’ordres

Un guide- solution pour cette crise, selon nos sources car il comprend deux importants chapitres : des pistes de solutions pour une réorganisation en interne et une adaptation fonctionnelle et une offre innovante adaptée au nouveau monde de l’événementiel.

Le GPPEM a également signé des conventions de partenariats bilatérales avec différentes associations et fédérations professionnelles des divers secteurs qui constituent l’écosystème de l’industrie et services de l’événementiel. Il s’agit de l’UACC, le GAM, l’Association Marocaine des Entrepreneurs du Spectacle Vivant (AMESVI), la Fédération Nationale de l’Industrie Hôtelière (FNIH) et la Fédération Marocaine des Traiteurs (FMT).

Un big travail toujours non effectif dans l’attente d’un signe ou d’une approbation.

 N’est-il pas plus que temps de créer une fédération et donner une légitimité à cet écosystème ?

Mekki Lahlou reste optimiste quant au sort de ces revendications. De notre côté en découvrant le détail du plan de relance et la fiche métier, tous deux mis à notre disposition par le Groupement, L’on se pose une question vu l’importance de ce secteur et de son impact sur d’autres secteurs : N’est-il pas plus que temps de créer une fédération et donner une légitimité à cet écosystème ?

 

Enquête réalisée par

Najiba Jalal & Gadi Abdelhadi

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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