De nouveau, le syndicat national de la presse marocaine oscille entre les slogans de défense de la profession et des pratiques qui interrogent la légitimité de certains qui parlent au nom des journalistes. Après la controverse suscitée par la réunion « controversée » avec ce qu’on appelle le « centre qatari des médias », dont l’origine nous est inconnue dans un pays qui ne reconnaît pas la liberté de l’activité syndicale dans la presse, se pose aujourd’hui une question encore plus embarrassante : qu’en est-il de la légalité de la continuité du président du syndicat à son poste malgré sa retraite ? La procédure légale a-t-elle été respectée pour son extension, comme le stipule le Code du travail marocain ?
Selon l’article 526 du Code du travail, un salarié est mis à la retraite à l’âge de soixante ans, et la période de travail ne peut être prolongée que sur demande écrite de l’employeur, avec l’accord du salarié et par décision du ministère du Travail. Cela soulève de grandes interrogations sur la situation d’Abdelkebir Khachichin, le président retraité du syndicat : a-t-il fait une demande officielle de prolongation ? Le ministère a-t-il donné son accord ? Cette procédure administrative et essentielle, qui garantit l’égalité des chances et évite le népotisme professionnel, a-t-elle été respectée ? Ou bien s’est-on contenté d’un raisonnement basé sur une « commission provisoire », des « consensus » et un partage des privilèges, loin de la loi ?
Si l’extension ne s’est pas faite conformément aux procédures légales, la continuité d’Abdelkebir Khachichin à la présidence du syndicat constitue une violation flagrante de la loi, portant atteinte à un poste qui aurait dû s’ouvrir à une nouvelle génération de journalistes. Est-il acceptable que des jeunes diplômés et ambitieux soient exclus de postes professionnels sous prétexte qu’il « n’y a pas de successeur », alors que des retraités conservent leur salaire et leurs titres professionnels sans base légale ? Un individu qui ne travaille plus et n’exerce plus réellement la profession de journaliste a-t-il le droit de conserver sa carte de presse, de signer des accords et de représenter la communauté journalistique marocaine auprès d’entités extérieures ?
Le communiqué publié aujourd’hui par l’un des groupes médiatiques, niant toute relation avec les initiatives de certains confrères syndicalistes, bien qu’important, révèle l’importance de l’intersection entre les rôles professionnels, politiques et syndicaux, et expose comment le syndicat a été transformé en une plateforme pour le pouvoir et des relations obscures. Ce communiqué était nécessaire, voire urgent, car certaines personnes en sont venues à utiliser leur appartenance professionnelle comme un pont pour justifier une ouverture injustifiée sur des entités exerçant une influence douce et douteuse sur les médias marocains, transformant ainsi le quatrième pouvoir en un instrument fonctionnel soumis à des agendas régionaux.
Mais un simple communiqué ne suffit pas.
La véritable lutte aujourd’hui est une bataille de sincérité avec soi-même, un combat pour l’éthique dans l’action syndicale, pour libérer cette action de l’emprise du népotisme et des prolongements douteux. Le syndicat, qui aurait dû être un bouclier pour la profession et la patrie, ne peut pas être géré avec la mentalité des retraités ni selon la logique des transactions secrètes. Il ne peut pas être l’apanage de personnes qui ne pratiquent plus le métier, qui ne viennent à leurs bureaux que lors d’événements photo ou pour signer des accords douteux.
Il est grand temps d’ouvrir un débat franche au sein de la communauté journalistique marocaine : qui a le droit de représenter les journalistes ? Quelles sont les conditions pour continuer à occuper des responsabilités au sein du syndicat ? Acceptons-nous que la carte professionnelle et le titre syndical restent la proie de calculs étroits et de postes figés ?
Nous sommes à un moment qui exige du courage, pas de la complaisance. À une étape délicate qui nécessite une intégrité légale et éthique, et non des solutions temporaires. Qu’un enquête soit ouverte, et que la question soit posée publiquement : le président du syndicat agit-il aujourd’hui conformément à la loi ? Si ce n’est pas le cas, qu’il rende sa carte, et qu’une nouvelle page s’ouvre, construite sur la transparence et non sur la loyauté, sur le respect de la loi et non sur son contournement.