Une cour canadienne condamne Hicham Girando pour diffamation et accorde plus de 164 000 dollars à un avocat de Casablanca.

Une cour canadienne condamne Hicham Girando pour diffamation et accorde plus de 164 000 dollars à un avocat de Casablanca.

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La cour supérieure du Québec au Canada a condamné le YouTuber marocain résident à Montréal, Hicham Gerrandou, après sa participation à une affaire de diffamation aggravée contre l’avocat marocain Adel Saïd Lamti, membre du barreau de Casablanca. Le jugement rendu le 14 juillet dernier constitue une décision sévère qui oblige Gerrandou à verser plus de 164 000 dollars canadiens à Lamti, répartis entre compensations morales, matérielles et punitives. De plus, un ordre judiciaire permanent a été émis pour interdire à Gerrandou de publier tout contenu diffamatoire contre le plaignant à l’avenir, un jugement qui reste en vigueur malgré l’appel.

L’affaire remonte à mai 2023, lorsque Gerrandou a lancé, via les plateformes Facebook, TikTok et YouTube, une série de vidéos dans lesquelles il accusait l’avocat Lamti de graves affaires liées à la corruption, au blanchiment d’argent, à l’évasion fiscale, et même de collaboration avec des services de renseignement algériens et la mafia corse. Dans ces vidéos, il le qualifiait de « sommet de la corruption », de « requin », et d' »avocat corrompu », ce qui a poussé le plaignant à lui adresser un avis judiciaire, suivi d’une action en justice devant la cour supérieure. En juillet 2023, un ordre judiciaire a été rendu contre Gerrandou pour l’interdire de publier, mais celui-ci a continué à répandre ses accusations, ce qui a conduit à sa condamnation pour outrage à la cour en janvier 2024.

Après un an et demi d’interruption, Gerrandou a repris ses campagnes en février 2025, quelques jours avant l’audience, mais il a choisi de ne pas se présenter pour se défendre ou prouver la véracité de ses allégations. La cour a tenu l’audience en son absence, tandis que l’équipe de défense de l’avocat Lamti, dirigée par l’avocat Claude Lamar, a présenté des preuves qualifiées de « déterminantes » par la cour pour affirmer le préjudice subi par leur client.

Le tribunal a noté que Gerrandou avait agi de manière imprudente et désinvolte, avec une intention malveillante, prétendant diriger une équipe d’enquêteurs alors qu’il ne faisait que diffuser des rumeurs infondées tirées de blogs et de sources anonymes sans aucune vérification. Lors de son interrogatoire, il a reconnu ne pas avoir vérifié les informations publiées et de ne pas se soucier de leur impact sur la réputation de l’avocat Lamti. La cour a considéré que son témoignage manquait de crédibilité et reflétait une indifférence dangereuse. Parmi les éléments sur lesquels Gerrandou s’est appuyé, se trouvaient des documents incomplets et des affaires qui avaient été clos depuis des années en faveur de Lamti, comme une convocation disciplinaire remontant à 2021.

Le jugement a précisé que l’avocat Lamti jouissait d’une réputation professionnelle élevée, pratiquant le droit depuis près de 30 ans, ayant reçu des certificats de reconnaissance de la Banque mondiale et de l’institution « Finances & Conseil Méditerranée », qui lui a décerné le titre d' »expert de confiance ». De nombreux directeurs d’entreprises ont également témoigné en sa faveur. La cour a souligné que la diffamation avait causé un préjudice durable à sa réputation professionnelle, qualifiée de « brique angulaire » de sa carrière, et que le dommage subi était difficile à réparer dans un domaine juridique qui repose sur la réputation et la confiance.

La cour a noté que les vidéos de Gerrandou avaient connu un large résonance, atteignant 1,1 million de vues sur YouTube, accompagnées de commentaires incitatifs appelant à l’arrestation de Lamti, à la saisie de ses biens, voire à l’incitation à la violence contre lui. Ces campagnes ont laissé des séquelles psychologiques aiguës sur l’avocat, qui a souffert d’isolement, d’anxiété et de dépression, et a dû se tourner vers un traitement après avoir subi une crise de panique. Il a également dû sécuriser sa maison par l’intermédiaire d’une agence spécialisée pour un coût de 9 514 dollars canadiens.

La cour a ordonné à Gerrandou de verser à Lamti une indemnité de 70 000 dollars canadiens pour les dommages moraux, 85 000 dollars canadiens en dommages punitifs, ainsi que 9 514 dollars en compensation matérielle. Un ordre permanent a également été émis pour retirer environ 15 vidéos et publications en litige, interdisant à Gerrandou de republier des contenus similaires, en confirmant l’application de ces mesures, même en cas d’appel.

En revanche, la cour a refusé d’obliger Gerrandou à publier le texte du jugement sur sa chaîne, arguant que cette action pourrait raviver le débat plutôt que de le clore. Elle a également souligné dans sa décision que la liberté d’expression ne justifie pas les insultes gratuites ou atteinte à la réputation d’autrui sous couvert de pseudo-journalisme sur Internet. La juge Bondaro a affirmé qu’aucun individu n’est au-dessus de la loi, même dans le domaine numérique, et que la vérification des informations et l’intégrité de la publication demeurent des limites à ne pas franchir dans tout contexte médiatique ou communicationnel.

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