Le wali de Bank Al-Maghrib, Abdelatif Jouahri, a affirmé que la protection du pouvoir d’achat et la stabilité du tissu entrepreneurial imposent l’adoption de décisions courageuses, fondées sur la prudence et la réflexion lors de la mise en œuvre des réformes majeures, loin de tout empressement pouvant compromettre les équilibres macroéconomiques.
Lors d’une conférence de presse qui a suivi la quatrième et dernière réunion annuel de 2025 du Conseil de Bank Al-Maghrib, Jouahri a mis un terme aux débats sur l’accélération de la flexibilité du taux de change du dirham, affirmant que la banque centrale préférait une approche graduelle plutôt que de se lancer dans des mesures précipitées qui pourraient avoir des répercussions négatives sur l’économie nationale.
Il a révélé qu’il avait réussi à convaincre le Fonds monétaire international de l’importance de repousser ce projet, annonçant que l’année 2026 serait consacrée à des tests techniques et à une préparation interne des systèmes bancaires, sans changement réel dans le régime de change, avec une évaluation de la situation prévue pour 2027.
Jouahri a expliqué que cette orientation vise principalement à protéger les petites et moyennes entreprises, et à assurer que les acteurs économiques prennent en compte les risques potentiels. Il a insisté sur le fait que la prise de décision appropriée nécessite une réflexion approfondie et une évaluation des conséquences avant d’entreprendre toute réforme structurelle.
Concernant l’évolution des prix, Jouahri a reconnu l’existence d’un fossé entre les indicateurs officiels de l’inflation et la perception quotidienne des citoyens, précisant que la diminution du taux d’inflation ne signifie pas une baisse des prix, mais simplement un ralentissement de leur augmentation. Il a affirmé que les citoyens jugent la situation économique en fonction de leur coût de la vie quotidien, et non à partir de chiffres statistiques.
S’agissant du Fonds de compensation, le wali de Bank Al-Maghrib a critiqué le maintien d’un soutien généralisé, considérant qu’il ne favorise pas l’équité sociale, puisqu’il bénéficie à la fois aux catégories riches et vulnérables. Dans ce contexte, il a appelé à une accélération de la mise en œuvre du registre social unifié, afin de diriger le soutien directement vers ceux qui en ont besoin.
Il a insisté sur le fait que les grandes réformes nécessitent une courage politique, soulignant que le fait d’attendre le moment idéal pour prendre des décisions difficiles peut conduire à leur paralysie permanente. Il a encouragé une communication claire avec les citoyens pour expliquer les motivations et les objectifs des réformes.
En ce qui concerne le financement de l’économie, Jouahri a révélé des déséquilibres structurels au sein du tissu entrepreneurial, où les très petites entreprises représentent environ 94 % du total, tandis que le chiffre d’affaires de 80 % d’entre elles ne dépasse pas trois millions de centimes par an, ce qui reflète leur vulnérabilité et leur difficulté d’accès au financement.
Il a expliqué que le programme « Antraka » a rencontré de grandes difficultés, avec environ 42 % des projets refusés en raison de l’insuffisance des études de faisabilité. Jouahri a affirmé que Bank Al-Maghrib a décidé d’adopter une nouvelle approche visant à accompagner les entreprises depuis l’idée jusqu’à sa mise en œuvre, plutôt que de se contenter de fournir un financement.
Concernant le secteur bancaire, il a indiqué que la banque centrale suit les discussions sur certaines opérations de vente ou d’acquisition, sans intervenir dans les décisions des acteurs, précisant que l’intervention de Bank Al-Maghrib se fait lors d’un changement de contrôle, à travers l’examen du projet industriel et le respect des règles prudentielles, avant d’être soumis à la commission compétente en partenariat avec le ministère de l’Économie et des Finances.
Enfin, Jouahri a mis en garde contre la montée du recours à la liquidité, considérant que la dépendance excessive au cash constitue un terreau fertile pour l’expansion de l’économie informelle et l’évasion fiscale, appelant à renforcer l’éducation financière et à encourager les moyens de paiement modernes pour intégrer davantage l’économie nationale dans un cadre structuré.





