Le projet de légalisation de la culture du cannabis au Maroc connaît un développement remarquable, illustrant un profond changement dans la manière dont l’État aborde ce dossier sensible, qui a été pendant des décennies associé à l’économie informelle. À peine quelques années après l’entrée en vigueur de la loi régissant les usages légitimes du cannabis, les premiers résultats de cette politique commencent à se faire sentir sur le terrain, à travers des chiffres officiels qui témoignent de l’ampleur croissante de l’engagement dans ce projet ambitieux.
Les données révélées par le ministre de l’Intérieur, Abdelouafi Laftit, dans une réponse écrite au Parlement, montrent que le nombre d’agriculteurs détenteurs d’un permis de culture de cannabis est passé de 430 en 2023 à 7 052 en 2025, répartis sur 413 coopératives de production. Cette évolution ne concerne pas seulement les individus, mais aussi les surfaces cultivées, qui ont augmenté de 192 hectares à 4 729 hectares durant la même période, soit une multiplication par plus de vingt.
Cette extension considérable du nombre d’agriculteurs et des terres cultivées illustre le passage d’une logique de criminalisation à celle de réglementation, l’État cherchant à intégrer cette catégorie d’agriculteurs dans l’économie organisée et à leur permettre de bénéficier de la chaîne de production légale destinée à des fins médicales et industrielles. La création de coopératives de production offre également aux agriculteurs une formation et un cadre législatif transparent pour commercialiser leurs produits.
Ce projet dépasse le seul aspect économique pour toucher directement les dimensions sociales des zones fragiles historiquement connues pour la culture du cannabis, notamment dans les provinces de Taza, Chefchaouen et Al Hoceima. Ce processus devrait contribuer à améliorer les conditions de vie de milliers de familles en créant de nouvelles opportunités d’emploi et en assurant un revenu stable, loin des risques liés à l’agriculture illégale.
Malgré ces chiffres encourageants, des défis persistent, notamment en matière de commercialisation des produits à l’échelle locale et internationale, ainsi que pour garantir un équilibre entre l’offre et la demande, sans oublier la nécessité d’un contrôle rigoureux de la chaîne de production pour prévenir tout dérapage vers des usages illicites.